Vous l'attendiez, vous ne l'espériez (presque) plus... toujours dans notre série Hugo sauve le monde en direct de son rez-de-jardin, voici quelques réflexions sur le monde québécois et canadien de la télévision, et comment celui-ci pourrait reprendre quelques couleurs.
Si les journaux et la radio sont encore des créatures du 20e siècle (et même d'avant, en ce qui concerne les journaux), la télé, elle, semble se trouver davantage engagée dans la révolution technologique amenée par l'avènement du web et la dématérialisation des contenus.
Ainsi, on ne compte plus les chaînes qui offrent du contenu en ligne, qu'il s'agisse de simples capsules, ou encore d'émissions complètes, et le Québec ne fait pas bande à part. Pour une fois. V, Radio-Canada, TVA, chaînes spécialisées... presque tous les postes d'importance dans la sphère télévisuelle québécoise offrent une partie de leur programmation en ligne, à défaut de permettre d'écouter en direct sur le web, une pratique encore trop peu répandue.
D'ailleurs, parlant d'écoute en ligne, la décision de Radio-Canada (pardon, ICI Radio-Canada Télé) de cesser de diffuser RDI en direct sur le web, sauf lors d'événements spéciaux, a porté un coup important à la dissémination de l'information en ligne. Le geste était nécessaire dans le cadre de négociations avec les câblodistributeurs, semble-t-il, ceux-ci estimant qu'ils n'avaient pas à payer pour offrir automatiquement la chaîne à leurs abonnés si ces derniers pouvaient simplement se rendre sur le web pour obtenir le même contenu. Il n'en reste pas moins que ce recul n'a jamais été complètement compensé, et qu'encore aujourd'hui, il est officiellement impossible d'écouter RDI en direct à partir du site web du diffuseur public. Cela semble être aussi le cas pour LCN, la chaîne d'information en continu de TVA. Certes, ces deux postes sont offerts gratuitement dans l'ensemble de base des câblodistributeurs, mais si l'on n'a pas accès à une télévision...
Il est aisé de dire que les chaînes de télévision devraient accélérer leur dématérialisation, envoyer toujours plus de contenu sur le web, histoire d'accommoder les gens n'ayant pas le temps ou l'occasion de s'installer devant un téléviseur. Après tout, comme je l'ai déjà dit à maintes reprises, l'univers numérique donne non seulement accès à une quantité bien supérieure de contenu, mais permet aussi de consulter ce contenu quand bon nous semble. La solution idéale, dans le meilleur des mondes. Mais...
Mais, il y a toujours deux questions en suspens. Deux pierres sur lesquelles on achoppe irrémédiablement lorsqu'il est question de transposer la télévision dans l'univers numérique. La première concerne les licences et les droits de diffusion. Relique du 20e siècle et de la compartimentation géographique de la planète, cette question des licences est celle qui fait rager lorsqu'une vidéo YouTube ne peut jouer, puisque "le contenu a été bloqué dans votre pays". C'est aussi la raison pour laquelle Radio-Canada ne met pas toujours en ligne les documentaires produits par la BBC, par exemple. Les ayants droit voient le web comme une menace à leur source de revenus, et réagissent par la peur: en bloquant tout ce qu’il est possible de bloquer. Au diable la frustration des internautes! Le problème existe déjà avec les DVD et les diverses régions; il n'a été que transposé en mode numérique. Une véritable révolution est donc nécessaire dans ce domaine, histoire de procéder à un grand ménage. Un contenu mis en ligne devrait être accessible à tous, partout, et, avec un peu de chance, pour toujours. Ce sera coûteux, certes, mais comme les plus malins passeront de toute façon par un VPN ou pirateront tout simplement le contenu qu'ils désirent s'ils rencontrent un verrou régional, à quoi bon s'entêter?
La (maudite) pub
La deuxième question est celle des revenus publicitaires. La part de lion de la télé commence à diminuer, certes, mais comme le champ est plus vaste que celui du petit écran, les chaînes de télévision tiennent mordicus à conserver les sommes accompagnant les émissions populaires. Il est certain que la pub diffusée lors de Tout le monde en parle rapporte plus à la SRC qu'une pub similaire présentée en ligne, en écoutant la reprise.
Pour cet aspect, point de salut, à l'exception de l'attente: ce qu'il faudrait, du moins dans le cas de Radio-Canada, ce serait un financement public accru, histoire de ne plus avoir tant besoin des revenus publicitaires pour garder la tête hors de l'eau. Et cela passe forcément par un changement du parti au pouvoir à Ottawa.
La récente décision du CRTC d'envisager la fin des quotas de contenu dans le paysage télévisuel canadien pourrait certainement mener à un rebrassage des cartes dans ce secteur. Impossible de savoir si cela sera bon ou mauvais pour les producteurs de contenu d'ici, surtout pour ce qui est des films, téléséries et émissions francophones. Il ne fait aucun doute, cependant, que le système actuel ne tient plus; et cela, le CRTC le reconnaît lui-même.
Étrangement, toutefois, ce même CRTC demande une multiplication des productions de grande envergure, histoire de concurrencer le contenu étranger. Sans quotas pour ce faire, qui aura envie de dépenser des millions de dollars sans savoir si ces efforts porteront fruit? Bien entendu, qui ne voudrait pas d'une télésérie canadienne ou québécoise ayant l'ampleur (et la portée) de Game of Thrones? Une série qui pourrait être vendue à l'étranger et susciter un engouement salvateur pour l'industrie nationale... Il faudra attendre, encore une fois, de voir si le milieu actuellement si compartimenté résistera à l'éventuel éclatement.
Et l'information, dans tout ça? Certains aspects sont déjà encourageants: Radio-Canada et TVA offrent déjà leurs bulletins télé en ligne, et la SRC fait aussi de même pour la radio. Saluons aussi la décision d'intégrer les reportages télé dans les textes d'information en ligne: ce mariage est souvent très bien réussi. Par contre, pourquoi le Téléjournal et les émissions d'information ne sont-ils pas disponibles sur Tou.tv? La plateforme existe déjà, et sa popularité ne fait aucun doute. Pourquoi, alors, ne pas en profiter?
Enfin, terminons avec l'information régionale, la grande perdante de la migration vers le web et de la baisse des revenus. Le salut passe-t-il par la transformation de Télé-Québec en une chaîne d'info régionale? Peut-être bien. Mais gageons que cette proposition de Martine Ouellet, candidate à la chefferie du Parti québécois, ne sera probablement pas reprise par Pierre Karl Péladeau si l'actionnaire de contrôle de Québecor remporte l'élection de cette semaine. Pour le reste, ce sera encore une question d'argent...
Si les journaux et la radio sont encore des créatures du 20e siècle (et même d'avant, en ce qui concerne les journaux), la télé, elle, semble se trouver davantage engagée dans la révolution technologique amenée par l'avènement du web et la dématérialisation des contenus.
Ainsi, on ne compte plus les chaînes qui offrent du contenu en ligne, qu'il s'agisse de simples capsules, ou encore d'émissions complètes, et le Québec ne fait pas bande à part. Pour une fois. V, Radio-Canada, TVA, chaînes spécialisées... presque tous les postes d'importance dans la sphère télévisuelle québécoise offrent une partie de leur programmation en ligne, à défaut de permettre d'écouter en direct sur le web, une pratique encore trop peu répandue.
D'ailleurs, parlant d'écoute en ligne, la décision de Radio-Canada (pardon, ICI Radio-Canada Télé) de cesser de diffuser RDI en direct sur le web, sauf lors d'événements spéciaux, a porté un coup important à la dissémination de l'information en ligne. Le geste était nécessaire dans le cadre de négociations avec les câblodistributeurs, semble-t-il, ceux-ci estimant qu'ils n'avaient pas à payer pour offrir automatiquement la chaîne à leurs abonnés si ces derniers pouvaient simplement se rendre sur le web pour obtenir le même contenu. Il n'en reste pas moins que ce recul n'a jamais été complètement compensé, et qu'encore aujourd'hui, il est officiellement impossible d'écouter RDI en direct à partir du site web du diffuseur public. Cela semble être aussi le cas pour LCN, la chaîne d'information en continu de TVA. Certes, ces deux postes sont offerts gratuitement dans l'ensemble de base des câblodistributeurs, mais si l'on n'a pas accès à une télévision...
Il est aisé de dire que les chaînes de télévision devraient accélérer leur dématérialisation, envoyer toujours plus de contenu sur le web, histoire d'accommoder les gens n'ayant pas le temps ou l'occasion de s'installer devant un téléviseur. Après tout, comme je l'ai déjà dit à maintes reprises, l'univers numérique donne non seulement accès à une quantité bien supérieure de contenu, mais permet aussi de consulter ce contenu quand bon nous semble. La solution idéale, dans le meilleur des mondes. Mais...
Mais, il y a toujours deux questions en suspens. Deux pierres sur lesquelles on achoppe irrémédiablement lorsqu'il est question de transposer la télévision dans l'univers numérique. La première concerne les licences et les droits de diffusion. Relique du 20e siècle et de la compartimentation géographique de la planète, cette question des licences est celle qui fait rager lorsqu'une vidéo YouTube ne peut jouer, puisque "le contenu a été bloqué dans votre pays". C'est aussi la raison pour laquelle Radio-Canada ne met pas toujours en ligne les documentaires produits par la BBC, par exemple. Les ayants droit voient le web comme une menace à leur source de revenus, et réagissent par la peur: en bloquant tout ce qu’il est possible de bloquer. Au diable la frustration des internautes! Le problème existe déjà avec les DVD et les diverses régions; il n'a été que transposé en mode numérique. Une véritable révolution est donc nécessaire dans ce domaine, histoire de procéder à un grand ménage. Un contenu mis en ligne devrait être accessible à tous, partout, et, avec un peu de chance, pour toujours. Ce sera coûteux, certes, mais comme les plus malins passeront de toute façon par un VPN ou pirateront tout simplement le contenu qu'ils désirent s'ils rencontrent un verrou régional, à quoi bon s'entêter?
La (maudite) pub
La deuxième question est celle des revenus publicitaires. La part de lion de la télé commence à diminuer, certes, mais comme le champ est plus vaste que celui du petit écran, les chaînes de télévision tiennent mordicus à conserver les sommes accompagnant les émissions populaires. Il est certain que la pub diffusée lors de Tout le monde en parle rapporte plus à la SRC qu'une pub similaire présentée en ligne, en écoutant la reprise.
Pour cet aspect, point de salut, à l'exception de l'attente: ce qu'il faudrait, du moins dans le cas de Radio-Canada, ce serait un financement public accru, histoire de ne plus avoir tant besoin des revenus publicitaires pour garder la tête hors de l'eau. Et cela passe forcément par un changement du parti au pouvoir à Ottawa.
La récente décision du CRTC d'envisager la fin des quotas de contenu dans le paysage télévisuel canadien pourrait certainement mener à un rebrassage des cartes dans ce secteur. Impossible de savoir si cela sera bon ou mauvais pour les producteurs de contenu d'ici, surtout pour ce qui est des films, téléséries et émissions francophones. Il ne fait aucun doute, cependant, que le système actuel ne tient plus; et cela, le CRTC le reconnaît lui-même.
Étrangement, toutefois, ce même CRTC demande une multiplication des productions de grande envergure, histoire de concurrencer le contenu étranger. Sans quotas pour ce faire, qui aura envie de dépenser des millions de dollars sans savoir si ces efforts porteront fruit? Bien entendu, qui ne voudrait pas d'une télésérie canadienne ou québécoise ayant l'ampleur (et la portée) de Game of Thrones? Une série qui pourrait être vendue à l'étranger et susciter un engouement salvateur pour l'industrie nationale... Il faudra attendre, encore une fois, de voir si le milieu actuellement si compartimenté résistera à l'éventuel éclatement.
Et l'information, dans tout ça? Certains aspects sont déjà encourageants: Radio-Canada et TVA offrent déjà leurs bulletins télé en ligne, et la SRC fait aussi de même pour la radio. Saluons aussi la décision d'intégrer les reportages télé dans les textes d'information en ligne: ce mariage est souvent très bien réussi. Par contre, pourquoi le Téléjournal et les émissions d'information ne sont-ils pas disponibles sur Tou.tv? La plateforme existe déjà, et sa popularité ne fait aucun doute. Pourquoi, alors, ne pas en profiter?
Enfin, terminons avec l'information régionale, la grande perdante de la migration vers le web et de la baisse des revenus. Le salut passe-t-il par la transformation de Télé-Québec en une chaîne d'info régionale? Peut-être bien. Mais gageons que cette proposition de Martine Ouellet, candidate à la chefferie du Parti québécois, ne sera probablement pas reprise par Pierre Karl Péladeau si l'actionnaire de contrôle de Québecor remporte l'élection de cette semaine. Pour le reste, ce sera encore une question d'argent...
Commentaires
Publier un commentaire